Les Russes sont nombreux à se tourner vers les traitement par sangsues pour soigner une myriade de maladies. Une tendance qui se confirme également à travers le monde, puisque ces invertébrés permettent notamment d’améliorer la circulation du sang.
Incroyable ?
Les ordonnances de médecins sont toujours tapissées de médicaments aux noms invraisemblablement compliqués. Dans les listes de prescription médicales russes, on trouve désormais un nouveau traitement : les sangsues, ces animaux visqueux et rampants. Chaque année, environ dix millions de ces invertébrés suceurs de sangs sont prescrits par les médecins russes, en guise d’alternative abordable aux anticoagulants, rapporte le New York Times.
La crise économique qui frappe le pays – due en partie à la chute des prix du baril de pétrole, elle-même étant la conséquence de sanctions internationales et de dépenses militaires – affecte particulièrement le secteur médical. Selon les médecins, les sangsues seraient, grâce à leur venin, un excellent traitement préventif contre les arrêts cardiaques et les maladies du coeur. Et à petit prix.
« Sa salive contient des substances anticoagulantes, antalgiques et cicatrisantes »
« La première fois, vous vous dites : ‘Mon dieu, des sansgues !' », raconte Elena Kalinicheva au New York Times. Hospitalisée au centre médical de Moscou, elle a choisi de recourir à un traitement par sangsues le temps d’une semaine pour traiter son mal de dos. « Une fois que vous essayez, vous comprenez qu’il n’y a pas de quoi s’inquiéter », promet-elle.
Très concrètement, la sangsue mord et injecte dans la peau sa salive, contenant des substances anticoagulantes mais aussi antalgiques et cicatrisantes. L’un des traitements les plus courants en Russie consiste ainsi à lâcher entre trois et huit de ces petits vers voraces sur l’épiderme. Ils viennent mordre et injecter leur venin pendant trente à quarante minutes. À l’issue de la séance, les sangsues rassasiées se détachent d’elles-mêmes.
Une thérapie millénaire contestée
Populaire jusqu’à la moitié du XIXe siècle, l’usage des sangsues à des fins médicinales remonte à l’Antiquité en Egypte, en Inde, en Grèce et dans les pays arabes. On nomme cette médecine l’hirudothérapie. Mais face aux avancées de la pharmacologie, sa popularité s’est vu décroître et sa légitimité remise en cause, au profit des médicaments.
En plus d’être brutales et inconfortables, les sangsues se retrouvent accusées de ne rien guérir du tout. Pour de nombreux médecins, leurs vertus médicales ne seraient qu’une illusion, une sorte de placébo. Pourtant, des études récentes ont démontré avec précision que les effets des sangsues sur la santé étaient bien réels dans certains cas. Elles demeurent ainsi une alternative pratique pour les petits budgets, même si les pouvoirs de la sangsue sont régulièrement surestimés.
Des effets sur la circulation sanguine
La Russie n’est pas le seul pays à connaître un retour en force des sangsues en médecine. Dans les cliniques et les hopitaux du monde entier, l’hirudothérapie refait son apparition. En Europe et en Amérique du Nord, elle est soumise à une stricte règlementation. Contrairement à la Russie, les invertébrés n’y sont pas utilisés pour prévenir les maladies cardiovasculaires. Aux États-Unis, leur utilisation médicale a été légalisée en 2004, et aujourd’hui 600 000 sangsues sont utilisées chaque année, essentiellement pour soigner des problèmes de peau, selon le centre de recherches BioTherapeutics Education and Research Foundation.
En France, il existe une seule entreprise, Ricarimpex, spécialisée dans l’élevage et la commercialisation des sangsues médicinales. Les laboratoires pharmaceutiques les utilisent également pour développer certains médicaments, comme des crèmes pour soigner l’insuffisance veineuse ou les hémorroïdes. Les sangsues favorisent la cicatrisation, en drainant le sang et en restaurant la circulation sanguine dans les veines obstruées.
En Malaisie, certains scientifiques défendent désormais leur utilisation dans les cas de chirurgie plastique et réparatrice. Le traitement est rapide, facile et ne comporte quasiment aucun effet secondaire, contrairement aux autres méthodes de cicatrisation post-opératoire existantes.
En Russie, leader de la production mondiale de sangsues médicinales, elles sont aujourd’hui majoritairement elevées dans des laboratoires. Les consommateurs peuvent aussi les retrouver en vente libre dans des magasins spécialisés. À moins d’un euro la sangsue, ceux qui préfèrent réaliser leur propre traitement à la maison peuvent emporter les bestioles dans des sacs en platique, tranquille.
Source : mashable.france24.com